pamphlet anti biocarburants

Friday, June 23, 2006

Une nouvelle mode délirante prétenduement écolo est en train de déferler : les biocarburants. Grâce à eux, il serait possible de se passer du pétrole et d'aider nos agriculteurs en manque de débouchés. En apparence, la solution semble idyllique : non seulement économiquement et politiquement cela représenterait la fin de la dépendance énergétique de l'Union Européenne, la fin du méchant et puissant lobby pétrolier, une rente supplémentaire pour le milieu rural mais aussi la possibilité de maintenir notre mode de vie actuel basé sur l'utilisation de véhicules particuliers. Ceux qui critiquent cette solution sont accusés de connivence avec le méchant lobby pétrolier voire pire, de connivence avec le fisc ... Je vais donc essayer d'argumenter contre cette injustice et essayer de prouver que même avec les meilleures intensions, la solution peut être pire que le mal et que les pétroliers n'y sont peut être pas pour rien. Bien entendu, il s'agit d'une simple réflexion, qui ne repose sur aucune enquête journalistique, documentée mais uniquement sur la logique, bon sens et quelques recherches sur le net.

1. Bilan énergétique des biocarburants

Le rendement moyen de la photo-synthèse est 1%. Il faut ensuite enlever l'énergie nécessaire à la production (machines agricoles, transport, production d'engrais, production de pesticides,
etc ...) Sur la biomasse produite, toute l'energie n'est pas récupérée : une partie de la récolte ne sera jamais transformée en carburant. Le bilan final est désastreux, et certains pensent même qu'il est négatif (plus d'énergie pour produire que d'energie produite ! voir article sur le journal 20 minutes). C'est comme si pour aller faire votre plein, vous dépensiez plus d'essence que le réservoir peut en contenir ... Un véritable gâchis commis au nom de l'écologie, un comble !

Il existe des solutions alternatives : le rendement moyen d'une cellule photo-voltaïque est 10%, et avec la recherche, on pourrait espérer augmenter ce rendement. Le problème de l'electricité solaire double :
- on ne sait pas stocker efficacement cette énergie (contrairement au bio-éthanol, le diesther ou à l'huile de colza)
les batteries sont trés peu efficaces (quelques dizaines de kilométres d'autonomie sur un véhicule) et trés pulluantes
- Bilan énergétique lui aussi peu glorieux : un panneau solaire coûte en énergie à fabriquer l'équivalent de 5 ans de production photo-voltaïque du même panneau ...

2. Bilan écologique des biocarburants

Au brésil, un grand pourcentage des voitures individuelles roule à l'alcool de canne à sucre depuis 1975. D'aprés le site FUTURINC (http://www.futurinc.lautre.net/article.php3?id_article=59) "chaque litre d'éthanol produit 13 litres de résidus hautement polluants et rejetés dans les cours d'eau ". Pire, toujours d'aprés le même article : "grassement subventionnée, la culture de canne à sucre s'est répandue sur toutes les terres disponibles. Sinon plus. Profitant en priorité aux grands propriétaires terriens et bousculant l'agriculture vivrière des petits exploitants."

Les biocarburants participent même déjà à la déforestation dans certaines parties du globe comme le remarque cet autre blog.

La planéte a déjà du mal à nourrir une population de plus en plus nombreuse : les surfaces cultivables ne sont pas infinies et la seule façon de les augmenter est de défricher encore plus de forêts. Dans ces conditions, cultiver des plantes pour en faire du carburant ne sera jamais rien d'autre qu'un crime contre l'humanité tant qu'il y aura des personnes sous-alimentées sur terre.

3. A qui profite le crime ?

On peut se demander, au vu de tant de désavantages, pourquoi les biocarburants sont si populaires. Je ne comprends pas pourquoi les écolos ne semblent pas trés mobilisés contre cette solution. Réfléchissez une minute : Si on vous dit qu'il n'y a plus de pétrole, que la planète est en danger et que continuer a utiliser la voiture est un acte anti-social, vous allez peut être privilégier les transports en commun, garder la voiture au garage aussi souvent que possible et ne pas en changer tous les 5 ans pour un plus gros modèle. Si, à contrario, on vous dit que la planéte est en danger, que le pétrole pollue, mais que vous pouvez continuer a changer de voiture tous les 5 ans pour un plus gros modèle aménagé pour rouler avec des mélanges gazoil-colza moins polluant, non seulement le lobby pétrolier pourra continuer à produire et à distribuer son carburant, sans même toucher à ses marges, mais le lobby de l'automobile pourra continuer à vendre toujours plus de voitures ! Un autre indice : ce sont ces mêmes grands groupes pétroliers qui commencent à faire de la publicité autour des bio-carburants, ça veut tout dire !

4. Quelles solutions alors ?

Ceci n'est pas un pamphlet pro-pétrole, loin de là. Nous devons ouvrir les yeux et ne pas nous laisser séduire par les marchands de rêve. Ne nous voilons pas la face : il n'existe pas de solution miracle ou défi énergétique actuel. Dans un premier temps, nous devons être capables de comprendre la probématique : climat qui se détraque sous l'effet de serre, pollution, ressources de pétrole en cours d'épuisement, désertification ou apauvrissement des terres, expansion des sécheresses, augmentation de la population et de la malnutrition etc ... Cette phase de prise de conscience est en cours. première victoire.
Une fois la problématique posée, nous devons être capables de savoir si nous voulons et/ou pouvons y apporter une réponse.

Certains seront tentés par une fuite en avant : ne faisons rien, ou pas grand chose, on verra bien ce qui se passe. Continuons à gaspiller, de toute façon on est foutus donc autant profiter de notre mode de vie tant qu'il est encore possible. C'est la voie actuelle choisie par les pays riches.

D'autres, comme les écologistes, sont tentés d'essayer de trouver des solutions. Encore faut-il que ces solutions aillent dans le bon sens et qu'elles soient suffisantes. Ce n'est pas le sujet de cette analyse, puisque je me cantonne aux biocarburants. Toujours est-il que si on choisit cette deuxième voie, il ne faut pas tomber dans le piége des manipulations et des fausses solutions comme les biocarburants.
Il n'existe pas de solution miracle, je le répéte : l'utilisation de biocarburants à petite échelle, pour résoudre un problème ponctuel de sur-production agricole en europe de l'ouest, peut effectivement faire partie de la solution, du moins s'il se contonne à l'usage exculsif sur place, par les tracteurs par exemple. L'utilisation du solaire, au rendement supérieur à la photosynthèse, s'il n'est pas la panacée, peut être une autre partie de la solution. Combiné à l'éolien, avec la mise en valeur de terres peu fertiles comme les déserts ou d'espaces inutiles comme les toits, l'électricité renouvelable pourrait offrir une alternative au pétrole. Encore faut-il trouver un moyen de stocker l'electricité dans les voitures : on a vu que les batteries offrent une solution écologiquement nulle : trés polluantes et peu efficaces. L'hydrogène, quoique moins facilement stockable que les biocarburants, pourrait être la solution : on sait fabriquer trés facilement de l'hydrogéne avec de l'eau et de l'electricité. Pour le stcocker et le transporter c'est déjà moins facile. Pour récupérer l'énergie au niveau des véhicules, c'est pas encore vraiment au point ... mais les chercheurs, s'ils ne sont pas récupérés par le lobby pétrolier, pourront, j'en suis sûr, développer des piles à combustible (qui transforment l'hydrogène en électricité en rejetant de l'eau) ou des moteurs à combustion (la combustion de l'hydrogène dans l'air donne de l'eau mais est explosive) qui marchent !

Enfin, quelle que soit la solution retenue, la seule et vraie solution au problème de l'énergie est de cesser la surconsommation. La voiture particulière a été un véritable désastre humanitaire et écologique : accidents, pollution et une immense soif d'energie. A tel point qu'en 200 ans l'humanité aura dépensé les ressources pétrolière que la nature a mis des millions d'années à nous offrir ! Réduire les déplacements individuels, utiliser les modes de transport doux (vélo marche à peid) et les transports en commun, voilà la seule véritable et définitive solution. De toute façon, un jour ou l'autre, s'il faut choisir entre manger et rouler en voiture, la choix sera vite fait, alors autant le faire tant que ce choix reste confortable et avant qu'il ne soit trop tard...

Compléments et suite de ce Pamphlet

Certains m'accusent de mauvaise foi ou aimeraient connaître mes sources ... J'apporte donc ici quelques précisions :

Dans le numéro de février 2007 du mensuel "Science et Vie", page 45, dans l'article consacré aux biocarburants, une comparaison est faite entre production d'essence sans plomb et production de super-éthanol :
"il faut 1,15 Mégajoules d'énergie fossile pour disposer de 1 mégajoule d'essence sans plomb [...] d'aprés une étude du Joint Research Center" dans son réservoir contre 0,84 Mégajoules pour le super-éthanol. Ceci infirme certes mon affirmation selon laquelle produire du bio-carburant consomme plus d'énergie que ça en produit dans les moteurs. La différence est toutefois des plus ridicules ! Reprenons le calcul : avec l'énergie fossile nécessaire pour obtenir 1 Mégajoules de super-éthanol, nous aurions pu obtenir 0,73 Mégajoules d'essence sans plomb : trés exactement 23 % de gain. Rien de révolutionnaire, d'autant plus qu'avec 1 Mégajoules de super-éthanol, on fait moins de kilomètres qu'avec 1 Mégajoules de super sans plomb. Ce gain peut être simplement obtenu en fabriquant des moteurs plus efficaces, moins gourmands et en poussant les gens à éviter de prendre la voiture quand celà est possible ! Nous sommes loin d'une révolution dans ce cas de figure...

Il existe des moteurs en céramique, au rendement bien supérieur aux moteurs en métal. Le rendement est en effet fonction de la température de combustion, et celle ci peut être bien plus élevée quand le matériau supporte des températures plus hautes ! Pourquoi ne pas développer de tels moteurs ? N'existent-ils pas déjà dans les cartons des fabriquants ?

Dans sa Chronique environnement du 7 octobre 2006 sur France Info, Nathalie FONTREL reprend à juste titre les propos de la ministre de l'écologie Nelly OLLIN : je cite :
<< "Non je n'irai pas au salon de l'auto" dit la ministre de l'écologie. En ajoutant "Je n'y ai rien à y faire tant que la question de la circulation des voitures en France sera traitée de façon aussi légère". >>
La journaliste explique les propos de la ministre :
<<Mais pour cultiver ces plantes industrielles on use, et peut être abuse des engrais qui rejettent du N2O, du protoxyde d'azote dont le pouvoir réchauffant sur l'atmosphère est 300 fois plus important que le gaz carbonique. >>
Elle précise enfin l'impossibilité concrète de recourir aux biocarburants en France :
<< Imaginons que l'on consacre 20% de la surface agricole utile aux cultures énergétiques, on produira 10% des carburants consommés en France. >>

Dans son ouvrage "Mal de Terre", Hubert Reeves, le célèbre scientifique, reprend ces statistiques effrayantes (page 121, ouvrage aux éditions du seuil collection "points", 7,50€) :
La production mondiale de céréales a commencé à décroître en 1984, tombant de 342 kilos à 308 kilos par personne entre 1984 et 2000. [...] Plus de 60 000 kilomètres carrés de terres arables [...] disparaissent chaque année. Les causes sont diverses. L'urbanisation rapide [...] A celà s'ajoute la pollution des sols provoquée par la culture intensive. [...] Les fertilisants chimiques rendent les sols plus compacts et plus vulnérables à la sécheresse et à l'érosion [...] L'irrigation entraine l'évaporation massive d'eau, laissant en dépôts des sels qui rendent le sol stérile.
J'ajouterai que constat vaut pour tous les pays, tous les climats et toutes les types de cultures. L'agriculture demeure bien-sûr indispensable à notre survie, on ne peut donc éviter ses inconvéniants mais nous devons à tout prix réduire ses effets néfastes en recourrant à une agriculture raisonnée, qualitative et non seulement industrielle et quantitative. Encore une fois, ce n'est pas l'objet de ce pamphlet. Ma seule remarque, c'est que les biocarburants ne sont pas indispensables à notre survie, et donc que rien ne justifie leur production à un tel prix écologique et humain.